RETARD DE CROISSANCE INTRA-UTERIN
ETIOLOGIES
Marqueurs acquis de thrombose, pathologie maternelle et RCIU
François Audibert, Hôpital Antoine Béclère, Clamart

Les pathologies vasculaires de la grossesse (prééclampsie, retard de croissance intra-utérin (RCIU), hématome rétro-placentaire (HRP), mort fœtale in utero (MFIU)) représentent une cause majeure de mortalité et morbidité maternelle et fœtale, dont la cause primitive n’est pas connue. Un mécanisme physiopathologique commun à ces situations est toutefois admis, sous la forme d’une dysfonction endothéliale, associée à une modification de la réactivité vasculaire et une activation de la cascade de la coagulation. L’existence de pathologies maternelles à risque de thrombose (thrombophilies héréditaires ou acquises) est de plus en plus reconnue comme un facteur de risque des pathologies vasculaires gravidiques, notamment des formes précoces, sévères et/ou récidivantes.

1- Le syndrome des anticorps antiphospholipides (APL) se définit par l’association de manifestations cliniques (thromboses veineuses ou artérielles, thrombopénie, fausses couches répétées) et de la présence d’APL (terme regroupant les anticorps anticardiolipines, l’anticoagulant circulant, le « faux VDRL+ » et d’autres anticorps moins spécifiques). Ces anticorps sont présents chez 1 à 3% de la population générale (très variable selon seuil et technique de dosage), et sont retrouvés plus fréquemment chez les femmes avec antécédent de pathologie vasculaire gravidique précoce et sévère. Il est démontré que l’association aspirine-héparine tout au long de la grossesse améliore le pronostic obstétrical des femmes avec antécédents et anticorps présents.

Parmi 55 femmes avec antécédent de RCIU sévère (<5e percentile), MFIU du 2e ou 3e trimestre, prééclampsie sévère ou HELLP syndrome, nous avons retrouvé 11 APL positifs (20%) contre 2/60 chez des femmes sans antécédent (odds ratio=7,1 ; IC95%=[1,4-68,0]). Une autre étude française récente n’a pas retrouvé d’association significative entre la prééclampsie modérée et la présence d’APL.

2- L’hyperhomocystéinémie a récemment suscité un vif regain d’intérêt en tant que marqueur de risque cardio-vasculaire. Les formes acquises de ce désordre métabolique sont essentiellement secondaires à des carences vitaminiques (acide folique, vitamine B6, B12). Plusieurs études récentes soulignent une association significative entre l’hyperhomocystéinémie plasmatique et le risque de prééclampsie ou de MFIU. L’association avec le RCIU isolé n’a pas été clairement établie. La vitaminothérapie associant acide folique, vitamine B6 et B12 permet de diminuer efficacement le taux d’homocystéine, mais n’a pas encore démontré, faute d’études cliniques suffisantes, son efficacité pour réduire les complications gravidiques.
Il est probable que d’autres perturbations métaboliques actuellement non reconnues viennent s’ajouter aux facteurs de risque de pathologies vasculaires gravidiques, permettant d’espérer une meilleure compréhension de la physiopathologie et éventuellement d’avoir accès à des traitements préventifs.